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photos Lucas Olivet

 

LES ICEBERGS

La pièce de Mathias Brambilla convoque tout l’imaginaire et le délire paranoïaque qui anime les masses comme les dirigeants. Délire de races, délire de géographie, délire de persécution, délire identitaire. Il serait aisé de reconnaître certains acteurs du monde politique actuel dans ce dialogue schizo-paranoïde qui, dans le même mouvement, énonce des vérités importantes.

Double entrée du texte donc, entrée sociologique et référentielle et entrée psychologique et imaginaire.
Le mécanisme délirant est ici livré dans son efficience même. Le délire est caractérisé par le morcellement du discours, sa discontinuité tout comme par son absence de référentialité claire qui entraîne des réflexes de surinterprétation.
C’est aussi le tableau vivant de notre époque, tant sur le plan social que culturel. En effet, la discontinuité et l’imaginaire règnent partout, de la rue au théâtre en passant par l’école et la télévision.  Les Icebergs  sont la mise en relief dialoguée de cette discontinuité dangereuse et alarmante. La folie n’est plus dans les asiles, elle habite le monde et l’homme du commun.
Le jeu des comédiens Pascal Berney et José Ponce en est le reflet par un mélange d’agression et de lamentation, d’exhibition et de dissimulation de la parole.

La part visible de l’iceberg n’est que peu de chose par rapport à celle qui repose sous les flots.
C’est à l’exhibition de cette part enfouie, inconsciente, des personnages, de la société et, pourquoi pas, de l’auteur lui-même, que Les Icebergs nous invite.

Sébastian Roth